CHIEN 51 – (2022)
Autrice : Laurent Gaudé
Né en 1972, Laurent Gaudé a fait des études de Lettres Modernes et
d’Etudes Théâtrales à Paris. En 1997, il publie sa première pièce, Onysos le furieux,
à Théâtre Ouvert. Ce premier texte sera monté en 2000 au Théâtre National de
Strasbourg dans une mise en scène de Yannis Kokkos. Suivront alors des années
consacrées à l’écriture théâtrale, avec notamment Pluie
de cendres, jouée au Studio de la Comédie Française, Combat de Possédés,
traduite et jouée en Allemagne, Médée
Kali, jouée au Théâtre du Rond-Point, Les
Sacrifiées, créée au Théâtre des Amandiers à Nanterre, Caillasses, créée
au Théâtre du peuple à Bussang, ou Danse,
Morob, créée à Dublin.
Son premier roman, Cris,
est publié en 2001. Avec La Mort
du roi Tsongor, il obtient, en 2002, le prix Goncourt des Lycéens
et le prix des Libraires. En 2004, il est lauréat du prix Goncourt pour Le Soleil des Scorta,
roman traduit dans 34 pays.
Editeur : ACTES SUD (2022)
4ème de couverture :
Autrefois,
Zem Sparak fut, dans sa Grèce natale, un étudiant engagé, un militant de la
liberté. Mais le pays, en faillite, a fini par être vendu au plus offrant,
malgré l’insurrection. Et dans le sang de la répression massive qui s’est
abattue sur le peuple révolté, Zem Sparak, fidèle à la promesse de toujours
faire passer la vie avant la politique, a trahi. Au prix de sa honte et d’un
adieu à sa nation, il s’est engagé comme supplétif à la sécurité dans la
mégalopole du futur. Désormais il y est “chien” – c’est-à-dire flic – et il
opère dans la zone 3, la plus misérable, la plus polluée de cette Cité régie
par GoldTex, fleuron d’un post-libéralisme hyperconnecté et coercitif. Mais au
détour d’une enquête le passé va venir à sa rencontre.
« Chien 51 est un projet auquel
je pense depuis de nombreuses années. La pandémie et les confinements
successifs ont accéléré sa genèse. Parce que soudainement, la dystopie s’est
invitée dans notre aujourd’hui.
Étonnamment,
j’ai retrouvé dans l’écriture de ce roman d’anticipation le même plaisir que
pour La Mort du roi Tsongor. Laisser mon imagination se
déployer, inventer un univers, avec son histoire, ses règles, ses aspirations
et ses dysfonctionnements. Et puis surtout, interroger notre monde, par
ricochet. Chien 51, c’est une version
possible de demain. Un reflet grimaçant de notre visage.
Dès
le début de l’histoire, le sang a été versé. La trame policière interroge la
tragédie par l’autre bout de la chronologie. Il ne s’agit plus d’essayer
vainement d’échapper à son sort comme le font les héros tragiques, mais de
remonter le fil de ce qui a mené au meurtre. Au fond, je crois que j’ai écrit
sur la mémoire. Le personnage de Zem Sparak est un homme qui porte en lui des
mondes disparus. C’est un sentiment qui m’envahit de plus en plus :
l’impression croissante, alors que j’avance en âge, de porter en moi des mondes
qui n’existent plus. Est-ce que nous ne sommes pas tous, un jour ou l’autre,
des animaux antiques perdus dans une société qui va trop vite ?
Chien 51 est
un livre sombre, noir, mais il y a en son cœur un point de lumière : celui de
la transmission. Le personnage fatigué de Zem Sparak rencontre une jeune femme
sans mémoire, Salia Malberg, à qui il va confier le soin de se souvenir. Au
moment où lui quitte le monde avec soulagement, elle commence à le comprendre
avec douleur. C’est ce qui se joue pour moi dans le livre : la possibilité
d’une passation et donc l’expression d’une humanité.” »
– Laurent Gaudé
Dystopie : récit
de fiction dépeignant une société imaginaire organisée de telle façon qu'il soit
impossible de lui échapper et dont les dirigeants peuvent exercer une autorité
totale et sans contrainte de séparation des pouvoirs, sur des citoyens qui ne
peuvent plus exercer leur libre arbitre.
Exemples de romans dystopiques :
1984, FARENHEIT 451, LA SERVANTE ECARLATE
« Aux petites heures du matin, avant
que l’aube ne fasse scintiller les façades des immeubles, les drones décollent
les uns après les autres comme une grappe de bourdons. Chacun a son plan de vol…
Ca et là, des quartiers cossus de Grandelune, Spada et Petit-Chagrin en Zone 2,
aux huit districts de la zone 3… Ils réveillent la ville… la campagne pour l’élection
d’un nouveau membre à la Commission directoire… » Extrait
La rencontre entre Zem et Salia ne se passe pas au mieux. Elle réside en Zone 2 et lui en Zone 3,
il devient alors son « chien ». Une enquête qui va révéler de sombre
pratique. Tout cela à partir de la découverte d’un cadavre au torse ouvert largement
et pour lequel manque un élément physiologique évident, en
d’autre circonstance.
Ils confrontent avec irritations leurs Zones
respectives. Avec leur us et coutumes.
Au-delà, l’auteur décrit les humains dans la
Magnopole créé de toutes pièces par les multinationales après avoir acheté un
pays entier en faillite, la Grèce. Là elles y ont parqué les populations qui
ont eu l’obligation de migrer malgré des rebellions et des manifestations
réprimées dans le sang par des milices recrutées pour l’occasion.
Laurent Gaudé immerge le lecteur de CHIEN 51
dans les soubresauts qui agitent la Zone 3, plongée dans les pires conditions
humaines et climatiques.
Zem, lui, a trouvé l’échappatoire à son univers
glauque avec une drogue qui lui permet de retrouver les instants fugitifs d’une
autre vie. Au risque de se perdre physiquement.
J’ai beaucoup aimé la lecture de CHIEN 51. C’est un
roman coup de poing comme on en lit peu décrivant des dérives politiques et
économiques bien connues. C’est ainsi une façon d’appréhender un « avenir »
tellement d’aujourd’hui ! Laurent Gaudé, par son sens du roman, de l’écriture,
parvient à insuffler à la fois du dégout pour cette société mais aussi une minuscule
porte de sortie où les uns et les autres pourraient bien se précipiter, se
révolter ! On survit comme on peu !
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