jeudi 17 mars 2022

DANS LA DIMENSION DE OBLIVION SONG, LE CHOIX BD DES CHRONIQUES D'ARRAKIS

 


OBLIVION SONG TOME 1 – (2018)Editeur US



Auteur : Robert KIRKMAN


Robert Kirkman est un jeune mais prolifique auteur (né le 30 novembre 1978 dans le Kentucky). Il se fait connaître avec la série Battle Pope qu’il publie lui-même au sein de la structure éditoriale qu’il a créé, Funk-O-Tron. Il est repéré par Image Comics qui publie BRIT et Invincible. Les films de George Romero lui inspirent différents scénarii de comics basés sur des histoires de zombies, dont The Walking Dead. Il puise dans ses souvenirs de jeunesse pour le scénario de sa série Invincible. Les aventures de ces superhéros adolescents sont un immense succès et deviennent l’un des fleurons de l’éditeur Image Comics.

Texte © Delcourt

Dessinateur : Lorenzo DE FELICI


Lorenzo De Felici est né en 1983 à Frascati, en Italie. Il suit un cursus « scénario pour cinéma et télévision » à Rome puis s’oriente vers la BD et poursuit son apprentissage à la Scuola Romana dei Fumetti, d’où il sort diplômé en 2006. Il débute alors en tant que coloriste chez Sergio Bonelli et réalise les couvertures de Lukas, dessinées par Michele Benevento, et de Caravan, d’Emiliano Mammucari, avec qui il re-travaillera plus tard sur la série Orfani. Chez Marvel Comics il met en couleur trois couvertures d’Amazing Spider-Man. En 2011, il se lance enfin en tant que dessinateur avec Drakka aux éditions Ankama, suivi de Alix et Arsénou à Rome chez Clair de Lune, tous deux scénarisés par Brémaud. En 2015, c’est avec Davy Mourier, Lewis Trondheim et Olivier Vatine qu’il s’engage sur le projet de SF : Infinity 8. Aujourd’hui, il est dessinateur et coloriste pour la France et l’Italie et travaille aussi bien en BD qu’en presse jeunesse.

Mise en couleur : Annalisa LEONI

Traduction : Lucile CALAME

Editeur : DELCOURT (2018)

160  pages

 

 

Toutes les reproductions des images BD de ce texte sont la propriété de leurs auteurs et de leurs maisons d'édition !


Résumé 4ème de couverture :

« Il y a dix ans, 300 000 habitants de Philadelphie ont disparu et ont été happés dans une autre dimension, surnommée Oblivion.

Le gouvernement a tout fait pour tenter de les retrouver et de les ramener, mais après quelques années, le programme de recherches a été abandonné. Seul Nathan Cole, un scientifique qui a mis au point une technologie de transfert vers cette dimension, continue à se rendre inlassablement sur place au péril de sa vie, afin d'extraire les survivants de cet enfer.

Mais est-ce que tous les disparus ont vraiment envie de rentrer...

Pourquoi souhaiteraient-ils rester là-bas, en dépit des dangers qui les guettent à chaque instant ? »

Ceci est une première dans les Chroniques d'Arrakis, puisque je vais parler de bande dessinée.

Je suis, depuis longtemps, un amateur de comics américain ; je précise, de l’âge d’or du comics : d’abord D.C. puis Marvel !

Toutefois, au détour des années 1990, j’ai laissé tomber ; par lassitude, mais surtout une surenchère de ces deux éditeurs, réveillé temporairement par « Spawn » de Mc Farlane et les créations du label « Image ».

Puis un jour, plus d’envie si ce n’est de lire, relire et redécouvrir en V.O. les grands anciens : Kirby, Dikto, Buscema ou Adams, Neal Adams!

Récemment, par le truchement d’un prêt auprès de la Médiathèque du Mans, j’ai eu en main le premier tome d’une production « Image »/« Skybound », « OBLIVION SONG » chez DELCOURT. Signature scénaristique de Robert KIRKMAN, le fameux créateur de la saga « Walking Dead »

Je l’avoue je ne suis pas attiré par le graphisme de  DE FELICI, et la mise en couleur de LEONI. Plus accro de la version collector en Noir et Blanc.

Anecdote : quand j’ai découvert la couverture de ce tome 1, j’ai cru voir le personnage de Fatalis (rire). Toutefois, je me suis plongé dans les textes de KIRKMAN et de l’intrigue qui est d’un thème assez classique pour un amateur de lecture de l’Imaginaire : un accident transporte un morceau de territoire et ses habitants de Philadelphie dans une autre dimension, Oblivion. Une dimension où grouillent des créatures monstrueuses.


Le personnage principal, Nathan Cole, s’est engagé dans une quête pour récupérer peu à peu ces « naufragés » et les ramener dans notre dimension. Même si son but ultime est de retrouver son frère. Au mépris des dangers mortels qu’il rencontre. Grace à une technologie qu’il a développée et contre les instructions du gouvernement en place.

Chaque épisode est l’occasion de montrer ces déplacements temporels mais aussi d’appréhender le monde d’Oblivion. D’en découvrir la survivance des groupes d’humains, leur combat quotidien. C’est un aspect de l’œuvre qui m’a particulièrement intéressé, ainsi que la psychologie et les relations entre les différents personnages, leur interaction avec leur environnement… D'un côté comme de l'autre. Leurs difficultés à vivre une "vie normale" dans leur relationnel scientifique ou intime.

Au-delà du script classique dis-je, mais qui peu à peu se complexifie avec différents indices d’une présence autrement dangereuse, des entités appelées « Les Sans-Visage », très évolués technologiquement parlant. Que veulent-ils ? C’est d’ailleurs la voie que semble prendre KIRKMAN à la fin du présent tome 1.

Aujourd’hui, aux USA , la série compte 35 numéros. Et sans doute une adaptation cinématographique dans l'avenir !

Le dernier numéro paru, à ma connaissance

En France, DELCOURT, nous a proposé 5 albums comportant environ 6 épisodes chacun. Plus des reprises de couvertures, et des variants d’autres dessinateurs…

variant cover de David FINCH

Revenons au dessins de DE FELICI ; je l’ai dit ce n’est pas ce qui m’a attiré de prime abord. C’est plutôt les compositions des pages. Passant des classiques cases à une pleine page. Avec une économie de détails parfois.


Et même l’absence de dialogues, pour laisser « parler » le dessin. Avec une approche très cinématographique ! Qui apporte presque des mouvements de travelling, de contre plongée qui évoquent la rapidité d'une fuite par exemple.
Page 1 du tome 1

Les émotions des uns interagissent avec les réactions des autres de manière forte. Je me suis laissé porter par ce travail graphique intelligent ; gommant mes à priori. Les couleurs, comme dans nombre de productions actuelles, sont parfois agressives (mais ce n'est que mon avis !). Elles noient presque le dessin. Sans doute portées par les nouvelles technologies en matière de mise en couleur. D’où mon attirance vers le dessin brut, en noir et blanc donc j’ai pu apprécier quelques reproductions…

Je vais lire les autres albums même si j’ai pu découvrir déjà certains des derniers numéros en V.O. D’ailleurs, il est à souligner que ce tome 1 est sorti d’abord en France, chez DELCOURT, en 2018, alors que la série n’était pas encore disponible aux U.S.A. Où elle continue à sortir en fascicules mais avec des reprises en albums au fur et à mesure. Aura-t-elle autant de numéros de WALKING DEAD ? Si le cœur vous en dit jetez un œil aussi sur les autres titres développés par KIRKMAN chez DELCOURT.



Et suivez les autres travaux graphiques de DE FELICI !

Illustration de couverture
 
Le tome 3







Ces albums sont disponibles au Mans chez la librairie BULLE.


 

Samuel CHAUVEAU, qui officie à la destinée  BULLE, la plus grande librairie spécialisée en BD de France


 


jeudi 10 mars 2022

HABEMUS PIRATAM, LE ROMAN VRAI DU DARK WEB, OU PRESQUE...

 


HABEMUS PIRATAM – 2ème édition (2018)

Auteur : Pierre RAUFAST


Pierre Raufast est né à Marseille en 1973. Depuis son premier roman, La Fractale des raviolis (prix de la Bastide et prix Talents Cultura 2014), il se plaît à jouer avec les structures narratives. Quand il n’écrit pas, il travaille dans la cybersécurité (et vice versa). 

Portrait (c) Nelly Raufast

Editeur : AUX FORGES DE VULCAIN (2022)

Sortie : Février 2022

Illustration de couverture : Elena VIEILLARD

Prix : 20

215 pages

 

 

4ème de couverture : « Francis mène une vie bien calme. Il faut dire qu’il est curé dans la vallée de Chantebrie et que ses paroissiens ont peu de péchés palpitants à lui confesser. Jusqu’au jour où un homme débarque dans son église pour s’accuser d’avoir enfreint chacun des dix commandements. Plaisir inattendu : l’homme est un hacker de génie et ses crimes sont pour le prêtre l’occasion de découvrir avec délice un monde dont il ne soupçonnait pas l’existence : le monde des pirates informatiques, de la cybersécurité et du dark web. Francis met alors le doigt dans un engrenage numérique qui va l’entraîner beaucoup plus loin que prévu. »    

 

Extrait : « Je viens me confesser parce que je vais mourir. J’ai péché. Pour cela on va me tuer. C’est l’évidence. Je ne le nie pas… pour les gens qui me poursuivent, tout est possible, mon père. Je le crains d’avantage que le jugement dernier… »

 


Le jeune père Francis reçoit ainsi la confession d’un « énigmatique » paroissien qui va lui dévoiler, semaine après semaine, à travers les textes des 10 Commandements, l’envers d’un décor que nous côtoyons journellement, à l’insu de notre plein gré. Par notre ignorance, notre faiblesse, parfois notre inconscience, nous laissons derrière nous une multitude de cailloux invisibles sur la toile informatique, mais qui dessinent notre personnalité. Ainsi que nos modes de vie, nos turpitudes aussi pour certains. Des informations qui intéressent fortement des entités plus ou moins bien cachées pour tenter de s’infiltrer dans notre quotidien et parfois nous arnaquer.



C’est à travers ces chroniques numériques bien banales pour celles et ceux qui possèdent les outils, les connaissances du détournement que nous entraîne le roman de Pierre RAUFAST « HABEMUS PIRATAM ».

Alors que je frappe ces quelques lignes, je regarde mon outil informatique d’un œil différent, mon clavier, les bruits de connexion, mon écran ! Ouf, je ne possède pas de webcam.  Guettant d’éventuel signes de piratage. Le ver est peut-être dans le fruit ou la fenêtre !

Lisez, faites lire « HABEMUS PIRATAM » ! Pour l’excellence du texte dans son écriture, son intrigue si proche de la vérité. Un glossaire des termes informatiques et une postface où la vérité du monde des hackers se dévoile.

L’actualité relaie quelquefois ces faits divers et les événements actuels en sont les révélateurs. Pourtant téléphones portables, tablettes, ordinateurs sont devenus indispensables tout comme les arnaques de plus en plus sophistiquées, les attaques de sites plus ou moins stratégiques. Malgré les parades mais qui ont « un train de retard ». Chaque élément informatique est une potentielle porte d’entrée pour le dérégler, l’utiliser sans laisser de traces.

J’ai particulièrement aimé comment notre hacker réussit à s’infiltrer dans la sécurité du musée du Louvre pour y dérober une œuvre d’art, ou comment il est possible de trouver le dernier roman en gestation d’une saga littéraire célèbre. Plus dramatique, les conséquences d’une panne provoquée volontairement d’un réseau électrique. On y apprend même que les acteurs du darknet, les hackers, tiennent salon où l’on s’échange les bons trucs et les derniers logiciels de piratage à la mode.

« HABEMUS PIRATAM » est un « roman » que vous allez dévorer page après page jusqu’au dénouement final, inattendu ! Ah ! J’allais oublier, l’humour qui teinte l’ensemble du texte avec des chroniques rurales si vraies. Du quotidien d’un prêtre dans un coin perdu de France. Et d'une "descente aux enfers" dans l'univers du web !

« … C’est à ces petits détails qu’on reconnait le vrai pro… » Extrait      


                       Je vous recommande ces autres romans de Pierre RAUFAST  



Le premier roman édité de Pierre RAUFAST en 2017






vendredi 4 mars 2022

PLONGEZ DANS L’IRRATIONNEL DE UBIK . LA VERITE EST AILLEURS !

 


UBIK – (1969)

Auteur : Philip K. DICK


Traduction nouvelle : Hélène COLLON

Editeur : J’AI LU Collection NOUVEAUX MILLENAIRES

Sortie : Février 2022

Prix : 18.00 €

247  pages

 

Quelques délires graphiques autour du roman UBIK

 

Résumé 4ème de couverture :

« La florissante agence anti-psi Runciter & Associés protège ses clients contre toute intrusion psychique. Mais lors d’une mission sur Luna, ses meilleurs éléments sont victimes d’un attentat à la bombe orchestré par une agence rivale. Glen Runciter est aussitôt placé en semi-vie. Rapidement, Joe Chip et les autres survivants sont témoins de phénomènes étranges : le visage de leur patron apparaît sur les billets de banque, les cigarettes n’ont plus aucun goût, la technologie semble régresser. Et un produit nommé Ubik, qui possède de curieuses propriétés, surgit aux moments les plus opportuns...»

 


J’ai souvenir de l’édition en poche (déjà chez J'AI LU) de l’époque avec son illustration de SIUDMAK ; me demandant le rapport du crâne et de la pluie avec le texte de DICK.

Je soupçonnais vaguement un auteur en plein délire d’écriture. J’étais loin d’imaginer la réalité créatrice du roman devenu depuis lors un classique de la littérature de l’Imaginaire. Oh ! Moi, lecteur naïf, il était donc possible d’écrire sous l’emprise de substances hallucinogène. Et d’écrire sur une machine à écrire un bouquin qui défie les codes de lecture. Qui cache, derrière les mots, une autre réalité. DICK m’avait donc bien « couilloné » depuis le début. J’aurai dû lire la 4ème de couverture de l’édition originale en français chez Robert Laffont

« Ils serraient de près les hommes de Hollis.

     Pour les neutraliser. Et puis les choses se gâtèrent.

     Ce voyage sur la Lune était une erreur.

     L'admission de Pat Conley dans le groupe de neutralisation était une autre erreur.

     Personne ne connaissait l'étendue de ses pouvoirs : elle pouvait manipuler le temps. 

     Et quand les objets se mirent à régresser dans le temps, Joe Chip se dit qu'ils avaient commis une erreur de trop. Le temps s'en allait en lambeaux.

     Une bouffée de 1939 dérivait en 1992.

     Ou était-ce l'inverse ?

Je cite Emmanuel CARRERE dans « Je suis vivant et vous êtes morts » (phrase empruntée au texte de UBIK) : « … Mus par cette routine suborticale et par quelques pilules de speed... ». Moi qui recherchait une once de logique dans cette histoire, j’étais entré en plein trip sans m’en rendre compte. J’aurai bien eu besoin d’une dose de UBIK, en bombe aérosol, pour recoller à la réalité. Qui d’ailleurs est-elle vraiment réelle. Quand je lis

« Saute dans la cuvette sans remords

Je suis vivant et vous êtes morts »,

 je me pose la question, maintenant, de ces gens que je croise et que je ne reverrai plus, sont-ils réels ?

 


Laurent Queyssy, dans son texte figurant dans la revue BIFROST, se posait sans doute la question ! «Tous les univers de la science-fiction sont dans Ubik.

     Des nouvelles inédites du monde entier, une partie rédactionnelle sérieuse et rigoureuse, des infos sur toutes les conventions et les critiques de toutes les nouveautés.

     Fongus de Ganymède et autres Bleeks martiens, Ubik est la revue qu'il vous faut.

     Sans danger pour la santé mentale si lu dans le bon sens.

 

     En 1966, Dick rédige Death of an Anti-Watcher (« Mort d'un anti-guetteur »), qui paraîtra en 1969 sous le titre d'Ubik. C'est la France qui, comme souvent, accueillera avec le plus d'enthousiasme le roman lors de sa parution en 1970 chez Laffont (les fameuses couvertures argentées). « Texte phare », « chef-d'œuvre », les qualificatifs ne manquent pas à propos de ce livre qui termine fréquemment numéro 1 lors des référendums demandant aux lecteurs leur roman de S-F préféré.

 

     Imaginez maintenant la surprise d'un adolescent de 14 ans, dans les années 90, découvrant un roman que tous considèrent comme une œuvre majeure du genre qu'il affectionne. Il a lu et entendu tellement de bien à son propos qu'il ne peut qu'être déçu ; c'est inévitable.

 

     Et pourtant...

 

     Dès le départ, il se montre intéressé par le problème de Glen Runciter. Il trouve fascinant le concept de semi-vie permettant à Ella, la défunte femme de Runciter, de communiquer avec le monde extérieur. L'idée de groupes de télépathes se combattant, bien que peu originale, lui paraît intéressante. Et puis, il y a Joe Chip, le prototype du personnage insignifiant qui travaille dans l'équipe de Runciter et qui lutte sans cesse contre ses appareils ménagers et contre sa porte qui ne veut jamais s'ouvrir. Les leitmotive dickiens sont là, avec le changement de réalité qu'opéré le pouvoir psy de Pat Conley le conapt et Jory l'enfant en semi-vie qui perturbe les communications du Moratorium où se trouve Ella. Bref, l'exposition est drôle, bizarre et ne déçoit pas l'adolescent.

 

     Tout va vraiment débuter avec l'arrivée sur la Lune de l'équipe de Runciter, dont la mission est de contrer le groupe concurrent, celui de Ray Hollis. Mais l'affrontement tant attendu par le jeune homme n'aura pas lieu. Le combat de pouvoirs psi avorte (en même temps que l'intrigue échafaudée par Dick) avec l'explosion d'une bombe qui tue Glen Runciter et oblige son équipe à le rapatrier sur Terre et plus précisément dans le Moratorium, aux cotés de sa femme. C'est à ce moment là que le jeune lecteur commence à comprendre le pouvoir de fascination qu'exerce le livre qu'il est en train de lire. Il n'a jamais été confronté à cela auparavant et il n'est pas au bout de ses surprises. Tous les personnages vont devoir maintenant lutter contre l'entropie (autre leitmotiv dickien), adversaire qui réduit certains d'entre eux, au sens propre, en cendres. Le roman n'est plus qu'une course contre la montre dans laquelle les protagonistes essayent de sauver leur peau alors que leur environnement régresse.

 

     C'est sous forme de graffiti qu'une partie de la vérité va apparaître à Joe Chip et que l'adolescent va enfin rallier le camp de ceux qui ont lu le livre et qui hurlent à qui veut l'entendre qu'Ubik est un chef-d'œuvre !

 

     Le retournement de situation paraît, avec le recul, être une ficelle maintes fois utilisée, et pourtant... Le roman est tellement passionnant que Dick manipule son lecteur du début à la fin avec une rare maestria. Le choc de la première lecture passée, l'adolescent se replonge dans le texte en se disant qu'après tout, il n'y a qu'un peu d'esbroufe, de poudre aux yeux dont l'auteur se sert pour faire monter la sauce. Encore une fois, il doit se rendre à l'évidence, Ubik est beaucoup plus complexe qu'il n'en a l'air. Les coups de théâtre ne sont pas là pour masquer un manque de fond mais participent, au contraire, à l'opacité, au malaise dont sont pris les protagonistes et, par ricochet, le lecteur. La bouée de sauvetage qu'est l'entité Ubik n'a que peu (on pourrait en discuter longtemps) de connotations religieuses et reste un des concepts les plus fascinants créé par Dick, tout au moins dans la forme qu'elle revêt. La construction narrative non linéaire est un essai transformé par un auteur en quête de renouvellement. Pour autant et en cherchant bien, le texte n'est pas exempt de certains défauts dus à des tics d'écriture dickiens que viennent combler et ensevelir la puissance dévastatrice et novatrice des idées de l'auteur.

 

     Mais l'adolescent de 14 ans, quant à lui, lit ou relit toujours des livres de Dick et reste convaincu que plus jamais il n'aura un choc comparable à celui qu'il a eu à la découverte d'Ubik. Il continue pourtant de rêver...

 

     Ah, au fait... l'adolescent n'est pas celui que vous croyez : je suis lecteur et vous êtes critiques ! »

 

« Au réveil, Philip K. s'aperçut que, d'humain symétrique, bilatéral et pas trop vilain d'aspect, il s'était métamorphosé pendant la nuit en... corps planétaire arrondi orbitant autour d'une étoile rouge gigantesque et translucide. En fait, par simple auto-perception, par l'aura globale projetée dans les graines de sa conscience, Philip K. conclut qu'il était devenu une tomate. Une tomate comparable, en dimension et en masse, à la planète Mars. »

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la plus fascinante des œuvres de S-F dans un dossier exceptionnel. Car s'il est, en matière de science-Fiction, une œuvre à clés, c'est bien celle de Philip K. Dick. Entrez dans l'univers du créateur de Blade Runner avec un guide de lecture, quatre études poussées, deux interviews, et trois nouvelles d'écrivains qui, chacun à leur façon, cocasse ou terrifiante, rendent hommage à l'une des plus grandes figures littéraires du XXe siècle."

 Dans la présente édition de UBIK, Queyssy signe d’ailleurs une très intéressante postface.

N’oublions pas la traductrice, Hélène COLLON qui propose un texte « rafraîchi » par rapport à celui du traducteur d’origine, Alain DOREMIEUX. Quand même pas des moindres !

Couverture de l'édition FRANCE LOISIRS

Et alors, lecteur de ma Chronique, de quoi parle UBIK vraiment. De cryogénisation (DICK avait été intéressé par le cas de Walt Disney plongé dans un caisson cryogénique) et par des êtres aux pouvoirs extra sensoriels ? Et puis DICK évoque « les mondes illusoires de l’esprit. 

.. Ceux de presque morts réveillés de temps en temps lorsque des parents viennent leur rendre visite. Mais les esprits commencent à s’unir pour former leur propre monde qui semble parfois plus authentique que la réalité extérieure… » (à lire dans le chapitre L’ESPACE INTERIEUR  dans les thèmes de la S.F. extrait de L’ENCYCLOPEDIE VISUELLE DE LA SCIENCE-FICTION).


Oubliez l’avenir de 1992 vu depuis l’année 1969 avec une conquête spatiale vers la Lune et Mars. Oubliez ces curieux glissements du temps, les pouvoirs psy … L’anti héros, Joe Chip, voit sa raison lui échapper peu à peu avec des incursions anachroniques et des messages de son employeur Runciter ainsi que des apparitions d’un mystérieux produit, UBIK !


Une plongée à la limite de la schizophrénie qui pourrait en dérouter plus d’un ! Mais vu avec la patte d’un très grand auteur, Philip K. DICK. 

« … Par les trous soudains visibles du décor se glissaient les messages d'Ubik.

Ubik est partout. Dans ce monde et dans l'autre.

Mais qui est Ubik ? »